Interview
Rencontre avec Thomas VERGIN, archéologue du bâti spécialisé en archéologie du peuplement au Moyen Âge, doctorant à l’université de Caen-Normandie et Georgie BAUDRY, archéologue spécialiste du petit mobilier métallique et de la tabletterie médiévale.
Quel est l’objet de votre venue au musée aujourd’hui ?
Nous sommes au musée pour étudier et référencer le mobilier des sites de hauteur du Châtillonnais. Il s’agit de sites perchés sur une butte témoin comme Vix ou Griselles, sur un rebord de plateau comme Aignay-le-Duc ou sur un éperon barré (promontoire rocheux coupé par un retranchement) comme Châtillon ou Brémur, de la période de l’Antiquité tardive au Haut Moyen Âge (du 4e au 11e siècles)
Quelle est la particularité de ces sites ?
Les sites de hauteur sont densément occupés à cette époque, c’est attesté dans le Jura, en Auvergne et dans le Beaujolais par exemple, mais nous avons beaucoup moins d’informations pour les zones de plateaux ou de vallées comme le Châtillonnais.
La recherche sur les occupations de hauteur de la fin de l’Antiquité est relativement récente en France puisqu’elle intervient à partir du début des années 2000 bien que l’on compte quelques travaux pionniers dès la première moitié du 20e siècle. Nous disposons de descriptions d’objets, mais très peu de datation, c’est une époque très peu documentée.
Quel est le but de cette étude ?
Le but est de dégager un phénomène caractéristique de ces occupations de hauteur et de leur intégration dans le réseau de peuplement des cités de la fin de l’Antiquité jusqu’à l’époque carolingienne en se fondant à la fois sur les structures, le mobilier mis au jour et les nécropoles associées.
Comment se déroule-t-elle ?
Nous avons obtenu une première autorisation de prospection cette année, il s’agit d’une prospection « inventaire » pour mettre à plat les données qui existent, mobilier, données LiDAR du Parc National de Forêts... Nous élaborons des fiches pour chaque site, nous pouvons en compter une quarantaine. Il y a parmi eux des sites très bien connus comme les châteaux de Duesme, de Brémur ou l’agglomération de Châtillon, car il y a eu beaucoup d’occupation et des sites pour lesquels nous avons juste une photographie aérienne où nous pourrons déceler une enceinte et un fossé sans en être certains.
Nous passons en revue le mobilier de l’époque mérovingienne pour affiner la datation quand il y en a, ce qui n’est pas toujours le cas. Les objets du Châtillonnais proviennent surtout de nécropoles.
Pourquoi si peu de mobilier ?
Par rapport à l’Antiquité, le Moyen Âge est une période qui n’a pas livré beaucoup de mobilier. Les sites de hauteur, de par leurs caractéristiques se prêtent moins à en livrer car ils subissent beaucoup d’érosion et les structures sont de fait très arasées. Le mobilier va se retrouver dans des éboulis, dans le sédiment des pentes et sera donc moins en place sur le site. Il est difficile de faire de la stratigraphie sur ce type de site, cela complique la datation mais c’est d’autant plus intéressant !
Autre difficulté, dans les études de la première moitié du 20e siècle, certaines structures sont parfois datées protohistoriques mais il arrive qu’elles soient plus récentes ou que le site soit occupé à plusieurs périodes différentes comme Vix par exemple.
Quelle sera la suite de l’étude ?
Après cette phase d’inventaire, nous demanderons l’autorisation de fouiller un site caractéristique afin d’en relever précisément les structures ou bien un site pour lequel nous n’avons pas beaucoup de données afin de mieux le documenter, cela dépendra des opportunités mais dans tous les cas, il y a de quoi faire ! Nous ne sommes qu’au début de l’étude, d’autres collègues interviendront notamment sur le verre, sur la céramique médiévale (céramologue), sur les ossements d’animaux (archéozoologue) et les ossements humains (anthropologue).