Quelles relations entre la dame de Vix et ses voisins proches ou éloignés ?
Entretien avec Fabrice Demeter, paléoanthropologue au Centre Geogenetics de Copenhague
07 mai 2018 - 15h15 - 10 juin 2018 - 15h15
- Fabrice Demeter, quelle est votre spécialité ?
Je suis paléoanthropologue et je travaille pour le Centre Geogenetics de Copenhague au Danemark. Je collabore également avec le Muséum national d'Histoire naturelle de Paris et le Musée de l'Homme. J'ai obtenu une thèse de Paris 1 Panthéon-Sorbonne en Préhistoire-Anthropologie avec pour directeur Yves Coppens. Si j'étudie les origines de l'Homme en Asie du sud-est, je m'intéresse aussi à l'histoire des migrations humaines en Eurasie de l'ouest du Paléolithique à l'âge du Fer.
- Dans quel cadre intervenez-vous aujourd'hui au musée du Pays Châtillonnais - Trésor de Vix ?
Dans le cadre d'un projet d'étude génétique des migrations humaines en Europe de l'ouest, projet mené par Kristian Kristensen et Eske Willerslev du Centre Geogenetics de Copenhague au Danemark, il nous est apparu que les collections archéologiques osseuses du musée du Pays Châtillonnais - Trésor de Vix, pourraient tenir une grande place, car illustrant de la présence humaine dans cette région, avec sociétés complexes et hiérarchisées, à l'âge du Fer. Je collabore pour cette région avec Bruno Chaume et Jean-Paul Demoule, dont je suivais d'ailleurs les cours de protohistoire européenne à la Sorbonne.
- Quel est le but de vos recherches, que vont elles nous apprendre ?
J'interviens dans ce projet pour identifier et au besoin étudier et documenter les collections osseuses qui illustrent le mieux de la diversité géographique et humaine durant cet âge du Fer dans l'Ouest de l'Europe. Par l'étude du génome des individus échantillonnés, nous allons mettre en évidence les relations qui ont existé entre les populations de l'âge du Fer du Pays Chatillonnais et les différentes populations des régions voisines et éloignées. Nous allons aussi étudier les relations qui ont existé au sein même de ces populations pour comprendre la hiérarchisation sociale et la place que prenaient les élites dans la société. L'étude génétique des individus des tombes à char avec leur riche mobilier funéraire nous permettra aussi d'en savoir un peu plus sur l'histoire des élites.
- Comment procédez-vous ?
Nous savons depuis peu que les molécules d'ADN se conservent le mieux dans les os pétreux, partie de l'os temporal situé en arrière du conduit auditif, en raison de leur compacité et de présence de cellules osseuses en plus grand nombre. C'est la raison pour laquelle, nous privilégions cet os aux dents. Cependant, nous prélevons aussi les dents lorsqu'elles sont disponibles pour en étudier certains isotopes stables. Les résultats de ces analyses isotopiques nous permettrons d'étudier le régime alimentaire et surtout de connaître la région d'origine de l'individu étudié.
- Quand les résultats seront-ils publiés ?
Entre le moment ou l'échantillon est prélevé et la publication des résultats dans une grande revue internationale, il n'est pas rare dans les meilleurs cas de voir s'écouler une année.